Accueil > La fourmilière > Cartographie de la Fourmilière... > France > Région Île-de-France > Les larmes des agents de la Région Île-de-France...
Les larmes des agents de la Région Île-de-France...
dimanche 2 décembre 2012, par
Des agents oubliés...
Sous la blouse, sous le tailleur, sous le costume-cravate, il y a des femmes et des hommes. Être en charge du personnel, c’est garder cette réalité à l’esprit.
La souffrance apparait lorsque les agents sont pris pour des objets, des pions que l’on déplace ou promeut, que l’on fait tomber ou que l’on écarte, sans même les regarder [1].
Si on ne nous regarde pas, c’est que l’on regarde autre chose. On voudrait connaitre ces objectifs, comprendre le sens de cette souffrance.
Parfois ils sont dits. A une agente handicapée, on lâche : « Je ne veux pas de bras cassés dans mon équipe. Il faut que tu partes. »
Parfois ils ne sont pas dits. L’information, c’est du pouvoir. On ne veut pas donner à l’agent la possibilité de développer sa propre stratégie, ne serait-ce que de survie. Par exemple, c’est au dernier moment que l’on renouvelle le contractuel. La précarité, cela rend taillable et corvéable à merci.
Des situations de ce type, le syndicat FA-FPT / SYNPER IDF en a vu à la Région Île-de-France [2] :
– Une agente du siège renouvelée depuis des années, trois mois par trois mois, sur un poste dont le besoin permanent évident est pourtant présenté comme un besoin occasionnel.
– Une agente contractuelle des lycées qui n’est pas renouvelée malgré la déclaration de son handicap et un peu plus de quatre années de travail.
– Une agente du siège brusquement changée d’affectation et mise au placard, dans un bureau de second jour, sans interrupteur, au nom de la "necessité de service".
– Une agente des lycées tellement insultée par sa supérieure qu’elle a due être évacuée par les pompiers.
Dans d’autres collectivités, lorsque le SYNPER parle de telles situations la réaction est rapide. A la région Île-de-France, à quelques exceptions près, ce n’est pas le cas. Malgré un protocole syndical qui contraint l’employeur à répondre en trois semaines, ce dernier ne répond presque jamais aux signalements qui lui sont faits sur la souffrance de ses agents.
Les agents les plus vulnérables sont ceux qui souffrent le plus. La collectivité n’a pas mis en place une politique concernant les travailleurs handicapés et est incapable de gérer convenablement l’inaptitude et le reclassement. La déprécarisation dont parle abondamment l’exécutif n’est qu’un nuage de fumée qui se dissipe aisément en regardant les chiffres et le traitement dont font l’objet les contractuels [3].
Quand on ne voit pas ce qui ne va mal, on ne voit pas non plus ce qui va bien. A la région Île-de-France, n’y aurait-il aucune récompense de la compétence professionnelle et du dévouement au service des agents ?
– Récemment, notre représentante en CAP s’est insurgée contre la promotion d’une agente ayant fait souffrir des agents qu’elle encadrait. L’employeur est néanmoins passé en force.
– La région refuse l’octroi de médaille d’honneur régionale aux agents des lycées, les privant ainsi des avantages sociaux liés [4]. L’employeur oserait-il en faire de même aux élus régionaux qui peuvent également bénéficier de cette médaille ?
... des amis choyés ?
Cette souffrance, lorsque la presse fait état des conflits d’intérêts dans la gestion de la Région Île-de-France [5] devient insupportable pour les modestes salariés que nous sommes.
Les syndicats ont aussi à faire face aux conflits d’intérêts. Le SYNPER s’interroge sur les intimidations et les blocages de carrière de certains de ses représentants. A contrario, le représentant du SYNPER a demandé sur quel critère la femme d’un représentant du personnel d’une autre organisation syndicale avait été recrutée [6] et placée à un poste stratégique.
Pour que ce que nous dénonçons soit clair aux yeux de tous, le SYNPER est en train de démontrer devant le tribunal administratif de Paris l’illégalité de l’attitude de la Région à son égard.
En situation de crise, la pression sur l’emploi est forte. Il faut que ces salariés soient tous soumis aux mêmes règles de recrutement et de promotion. On ne peut pas accepter les passes-droits. Nous avons attirer l’attention du Directeur général adjoint en charge des services entre la différence de traitement entre deux agentes contractuelles. La première est une secrétaire dont le lien matrimonial témoigne d’une proximité avec l’« establishment régional ». La seconde est une agente d’entretien élevant seule son enfant. La première a été titularisée en quelques mois. La seconde a été jetée à la rue après quatre ans "de bons et locaux services". C’est dans ce contexte que le SYNPER a demandé à Jean-Paul HUCHON de s’expliquer sur les critères de recrutement à la région Île-de-France [7].
Un syndicat indigné !
L’administration régionale est loin d’avoir la réactivité que l’on est en droit d’attendre. Face à l’inaction quasi systématique de la Région, le SYNPER accompagne les agents dans des démarches de médiation telle que la saisine du défenseurs des droits ou contentieuses telle que la saisine des tribunaux. Notre volonté est de contraindre la région à assumer pleinement ses responsabilités et à comprendre le prix du silence et de l’inaction.
Les agents, qui ont le sentiment d’être abandonnés, retrouvent l’espoir avec le SYNPER. Nous arrivons à améliorer les conditions matérielles des agents et à les aider à se préserver quelque peu du stress ou de la maltraitance psychologique. Lorsque ce n’est pas possible, nous cherchons une solution au travers de la médiation ou du recours à la justice.
Le SYNPER est allé jusqu’à porter plainte devant le procureur de la république pour non adoption du document unique, document de prévention des risques. La collectivité est en train de rédiger ce document qui porte sur les risques physiques (prévenir les accidents lors de port de charges lourdes ou l’utilisation de produits chimiques...). Mais le SYNPER est allé plus loin. La collectivité étant responsable de la santé physique mais aussi mentale de ses agents, il a contraint la collectivité à initier un travail de prévention des risques psychosociaux (le stress, le harcèlement, la placardisation, les suicides...) et initié différents procès devant le tribunal administratif de Paris pour défendre le droit des élu(e)s au Comité d’Hygiène et de Sécurité.
Faites savoir !
La collectivité semble encore peut motivée pour prendre à bras le corps le problème. Concernant les risques psychosociaux, elle a botté en touche en demandant un audit préalable. En attendant, la souffrance continue et le SYNPER collectionne les lettres de détresse laissées sans réponse. Aussi, pour éviter que la collectivité de s’exonère de ses responsabilités en agitant le contrat d’audit, ou l’arrêté de recrutement d’une psychologue du travail, le SYNPER attaque sur le champs de la communication.
Par deux fois, les salariés de la région Île-de-France ont manifesté contre la souffrance au travail et la presse en a fait un large écho [8].
Un troisième mouvement sera bientôt initié.
De plus en plus nombreuses sont les voix qui s’élèvent !
Mais le plus important, c’est de faire confiance aux gens de bonnes volontés, car prendre soin des agents devrait être une préoccupation commune entre le SYNPER et la collectivité.
S’il est incontestable qu’il faut repenser à qui confier la responsabilité de la gestion du personnel, il faut aussi soutenir ceux qui font du bon travail. Dans l’administration, certains agents cherchent à arrêter les dérapages que l’on constate un peu partout et lutte avec détermination contre les pesanteur d’une administration régionale que beaucoup compare à celle des ministères [9].
Le SYNPER revendique un climat de confiance et de reconnaissance du travail des représentants syndicaux. Le SYNPER souhaite vivement que notre collectivité s’engage à accompagner les agents dans la conciliation des deux parcours, syndical et professionnel. La reconnaissance du parcours syndical est un acte qui inscrit paix sociale, dialogue et compétences dans un cercle vertueux.
Dans l’exécutif certains élus cherchent à comprendre ce qui ne va pas et amorcent différentes actions qui vont dans le bon sens, celui de l’écoute des représentants des salariés [10].
L’opposition exprime également, régulièrement, sa préoccupation et a proposé une Charte sur la reconnaissance du parcours syndical dans le développement de la carrière et l’évolution professionnelle [11].
Il faut les soutenir et les encourager !
C’est un travail collectif que de construire la prévention de la souffrance.
Soutenez le SYNPER, par des dons ou en adhérant. Restez vigilant à notre prochain appel à rassemblement.
[1] Vous trouverez, ci dessous, une vidéo de Vincent De Gaulejac à propos de son livre "la société malade de la gestion" qui explique bien son travail, notamment sur le langage vide du management et l’idéologie des ressources humaines. Il explique comment l’humain est devenu une ressource de l’entreprise, un objet, un moyen pour une fin qui est le développement de l’entreprise.
– http://www.dailymotion.com/video/xdc0bu_la-societe-malade-de-la-gestion_news.
[2] 10 420 agents permanents travaillent dans les services de la Région d’Île-de-France au 31 décembre 2011. 1 749 agents dans les services du siège, avec près de 18 sites, 8 671 agents dans près de 470 lycées franciliens.
[3] La loi du 11 février 2005 pour « l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des
personnes handicapées » prévoit que la Région a pour obligation d’employer des travailleurs handicapés à hauteur de 6% de l’effectif global de ses agents rémunérés. Pour 2011, il est de 3,35%. La région est bien en deçà du taux d’emploi des travailleurs handicapés dans la fonction
publique territoriale qui s’établit en moyenne à 5,1% en 2010. Ne remplissant pas les critères, la "première" des régions a due payer une contribution ("sanction") qui s’est élevée à 1,4 M€.
Les collaborateurs de cabinet, les apprentis
et les agents recrutés pour exercer des fonctions correspondant à un besoin occasionnel ou saisonnier se multiplient. En ce qui concerne la déprécarisation, c’est un leure et le représentant du SYNPER, lors de la séance du 24 mai 2012 du Comité Technique Paritaire exceptionnel sur ce sujet, est intervenu dans ces termes : « Enfin,
sur l’exemplarité de la collectivité, je ne peux pas, malgré la joie de ce CTP d’aujourd’hui, laisser dire que nous avons été exemplaires parce qu’en 5 ans on a déprécarisé 1 599 agents au siège et dans les lycées. Ce n’est en effet pas honnête et j’aurais l’impression de trahir les salariés que je représente. Je vais vous donner un exemple très concret pour vous montrer que je ne polémique pas mais que je suis bien dans le réel. Le bilan social 2010, par
exemple, montre qu’il y a eu 1047 agents des lycées toujours contractuels, auxquels il faut ajouter les 154 agents non titulaires du siège sur emplois non permanents identifiés. Cela fait toujours 1 201 précaires rien que pour 2010. »
Le bilan social 2011 fait apparaitre 1358 agents permanents contractuels auxquels s’ajoutent 23 collaborateurs de cabinet, 160 agents non permanent au siège et 39 dans les lycées soit au total, 1 580 en 2011. Un chiffre en augmentation !
[4] Pour tout savoir sur la médaille, lisez notre article Récompensant les années de travail : la médaille.
[5] Nous avons retenu les articles suivants :
– Challenges n°319, 31 octobre 2012, Collectivités locales, le grand gaspi.
– Le Figaro, 14 octobre 2012, Florence Lamblin, une architecte écolo très discrète ; voir aussi, Atlantico.fr, 15 octobre 2012, Affaire Lamblin, le scandale dans le scandale
– Carnet de bord de Géraldine POIRAULT-GAUVIN, 27 septembre 2012, Génération Proximité, Génération Parité, Notre lettre à la Commission Jospin.
– Canard Enchaîné n°4796, 26 septembre 2012, Julien Dray fait ses commissions. Faisant référence à l’article, voir lelab.europe1.fr, Dray joue l’entremetteur pour son ami Benamou
– Le Point n°2087, 13 septembre 2012, Le scandale caché, Île-de-France le rapport qui dérange.
– Canard Enchaîné n°4793, 5 septembre 2012, ça roule pour Huchon.
– UMP.org, 28 juin 2012, "La plage Huchon" : le nouveau scandale de la gabegie des collectivités socialistes.
– Canard Enchaîné n°4791, 22 août 2011, Une machine à piston pour les élus franciliens et leur famille ; faisant référence à l’article, voir lelab.europe1.fr, le comite régional de tourisme d’Île-de-France : "machine à piston " ?
– Canard Enchaîné n°4790, 14 août 2012, Agapes olympiques. Faisant référence à l’article, voir Le conseil régional d’Ile-de-France a dépensé 150 000 euros pour un voyage de 4 jours aux JO de Londres.
– France Soir, 4 juillet 2011, "Huchon ne roule pas sur l’or"
[6] C’est lors de la séance Comité Technique Paritaire du conseil régional d’île-de-france en date du 15 mars 2012 que notre représentant a très clairement dénoncé ces attitudes.
[7] Lors de la séance Comité Technique Paritaire du conseil régional d’île-de-france en date du 22 octobre 2012. Le Président a alors esquivé les questions indiquant qu’il répondrait par écrit... Réponse qui ne nous est pas encore parvenue...
[8] Voir nos deux articles :
– Luttez contre les risques psychosociaux à la Région Île-de-France - Rassemblement le 30 mars 2012.
– Mardi 15 mai 2012 - Un rassemblement silencieux qui a fait du bruit....
[9] Saluons le travail courageux de certains gestionnaires et proviseurs, de certains chefs de service ou même de responsables des ressources humaines qui agissent avec sensibilité et attention malgré la pesanteur de la Région. Sur cette pesanteur, vous lirez avec plaisir l’article initulé Le Proviseur de Lakanal part dépité du 5 juillet 2011 par Pascale Kremer.
[10] Ainsi, peut-on citer l’intelligente décision des groupes de la majorité qui ont assoupli l’application brutale du règlement sur le temps de travail des agents des lycées ou encore le rejet de l’expérimentation de l’entretien professionnel pour les agents du siège par l’hémicycle régional.
– Le rapport n°CR 76-11 intitulé Mise en place de l’évaluation pour les agents du siège avait été présenté à l’Assemblée délibérante dans sa séance des 29 et 30 septembre 2011 pour une validation de l’expérimentation de l’entretien professionnel avant même l’avis du Comité Technique Paritaire, ce qui est illégal et irrespectueux des représentants du personnel. Grâce à l’action de certains groupes sensibilisés par le SYNPER et la CGT, le rapport avait été retiré et l’expérimentation enterrée. La dégradation du dialogue social ne permettait pas une tel exercice d’équilibriste sur un dispositif qui était loin de faire l’unanimité des organisations syndicales, parce que substituant l’évaluation du mérite à la notation. Ainsi, lors de la présentation du projet de décret relatif à l’expérimentation de l’entretien professionnel dans la fonction publique territoriale à la Séance plénière du Conseil Supérieur de la Fonction Publique Territoriale du 3 février 2010 ont voté « pour » la CFDT, l’UNSA, la CFTC et le collège employeur, la CGT a voté « contre » et se sont « abstenus » la FA-FPT et FO.
– L’Assemblée plénière du Conseil régional a adopté, du bout des doigts, le 24 juin 2011, un règlement du temps de travail des agents des lycées. Avec sagesse, les élus ont décidé de ne l’appliquer que temporairement. Il a été mis en place à la rentrée 2011. Le dispositif n’avait recueilli l’accord d’aucune organisation syndicale. Toutes les organisations, sauf FO et la CFDT qui s’étaient abstenues, avaient votés contre le projet. Il a fait l’objet de nombreuses grèves auxquelles ni FO ni la CFDT n’ont participé. Les efforts du SYNPER, de la CGT, de SUD, de la FSU et de la CFTC ont permis de mettre en difficulté l’exécutif qui a du revoir son projet. Pas assez à notre goût, mais en plus des votes favorables de FO et de la CFDT, le nouveau projet a recueilli l’approbation de la CGT lors du Comité Technique Paritaire du 27 juin 2012 et a donc été approuvé. Le rapport n°CP 12-598 intitulé adoption du règlement relatif au temps de travail dans les EPLE a été présenté à la Commission permanente du 12 juillet 2012. Les élus ont adopté le dispositif.
[11] Cette charte a été votée à l’unanimité sous forme de voeux, à l’exception notable du groupe socialiste. Le même exécutif socialiste se refuse à mettre en oeuvre la charte. Voir l’article du groupe de l’alliance républicaine, écologiste et sociale intitulé Béatrice de LAVALETTE interroge Jean-Paul HUCHON sur la mise en place de la Charte syndicale.