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La Région Île-de-France, première ou dernière des régions ?

lundi 25 novembre 2013, par synper

Lily la fourmi, mascotte d’un syndicalisme qui se bat pour un service public moderne gage de sa reconnaissance et de son efficacité, regarde avec attention les changements législatifs actuels et l’idéologie qui la porte. Le présent article est l’occasion de vous présenter simplement des mouvements législatifs complexes qui ont un impact direct sur les collectivités franciliennes et plus particulièrement pour la Région Île-de-France. Il se prolonge par une analyse de la stratégie régionale dans cet environnement mouvant, où plutôt par la dénonciation de l’absence de stratégie régionale.

1. Des réformes nécessaires pour une plus grande efficacité et une meilleure gouvernance dans un contexte de crise.

Un récent rapport de l’OCDE permet de rappeler le contexte des réformes en cours et leurs finalités :

« La crise a poussé de nombreux pays de l’OCDE à entreprendre des réformes de leur organisation territoriale et des relations entre les niveaux d’administration (Grèce, Portugal, Royaume-Uni, Finlande, Pays-Bas, Italie, Espagne, etc.).
En France, malgré les contraintes croissantes qui pèsent sur les budgets locaux résultant de la crise et du renforcement des politiques de consolidation budgétaire (gel des transferts aux collectivités territoriales, politiques d’économies et de mutualisation), on observe une forte résistance aux réformes territoriales. Ainsi, une partie de la réforme territoriale de 2010 (qui instituait des « conseillers territoriaux » communs aux départements et aux régions) a été abrogée tandis que la formule des « communes nouvelles » (communes fusionnées) n’a pas eu les effets attendus. La récente proposition de fusionner en Alsace les deux départements et la région pour constituer une collectivité territoriale unique a été rejetée par la population lors d’un récent referendum.
De plus, au niveau de l’Etat, les réformes récentes visant à accroître l’efficacité des structures administratives déconcentrées n’ont pas encore débouché sur une redéfinition des missions de l’État en région susceptible de clarifier les compétences au niveau local et d’aboutir notamment à la suppression de nombreux doublons. Une telle clarification permettrait des gains d’efficacité et de productivité tout en offrant la possibilité de définir des stratégies de développement économique, social et environnemental à une échelle moins fragmentée et plus pertinente.
Dans ce contexte, la nouvelle réforme de décentralisation, engagée en mai 2013 sous forme de trois projets de loi de « décentralisation et de réforme de l’action publique » promeut une nouvelle approche fondée sur la prise en compte la diversité des territoires dans l’unité de la République, autrement dit sur l’adaptation des modes d’organisation et des politiques aux spécificités et à la bonne échelle des territoires ainsi que sur le droit à l’expérimentation.
Dans ce contexte, la nouvelle réforme de décentralisation, engagée en mai 2013 sous forme de trois projets de loi de décentralisation et de réforme de l’action publique promeut une nouvelle approche fondée sur la prise en compte la diversité des territoires dans l’unité de la République, autrement dit sur l’adaptation des modes d’organisation et des politiques aux spécificités et à la bonne échelle des territoires ainsi que sur le droit à l’expérimentation.. » [1]

2. Une panique régionale due à l’absence d’anticipation.

Une Région très Rock’n’Roll

La Région Île-de-France est directement concernée par ces changements et les récents débats de la séance du conseil régional, ce vendredi 18 octobre, ont été autour du projet de loi créant une métropole du Grand Paris, texte actuellement examiné par le Parlement. Préalablement, le jeudi 14 novembre 2013, la FA-FPT avait été invitée au Ministère de la Fonction Publique où l’état d’avancement du projet de loi sur la Métropole du Grand Paris lui a été présenté pour avis. Deux fourmis de la fourmilière du syndicat FA-FPT / SYNPER IDF étaient dans les échanges avec le cabinet du Ministre. Nous avons pu rendre compte de ces changements auprès des salariés de l’institution laissés à l’écart de toutes informations par leur employeur.

La Région Île-de-France présente les débats qui ont eu lieu dans l’hémicycle en ces termes : « Quel sera l’impact de cette construction institutionnelle sur les compétences de la Région ? Quelles seront ses conséquences sur les objectifs fixés par le schéma Île-de-France 2030, en termes de construction de logements par exemple ? Lors des échanges, le président du conseil régional, Jean-Paul Huchon, s’est voulu ferme et rassurant. « Le meilleur moyen de répondre aux craintes qui s’expriment légitimement, c’est de voter le Schéma directeur de la région Île-de-France. » Et d’ajouter : « La Région, elle a fait son chemin, elle existe, elle a un budget, elle est élue au suffrage universel, elle est incontournable. » Quelques heures après ces échanges, les élus régionaux adoptaient un amendement précisant que « le conseil régional souhaite que la création d’une nouvelle structure métropolitaine s’appuie sur un renforcement des structures intercommunales et reflète le caractère multipolaire de l’Île-de-France. Le conseil régional insiste sur le fait que la création de cette structure se fasse dans le respect de l’ensemble des compétences de la Région et préserve la totalité de ses moyens financiers. » » [2]

Alors que la Région Île-de-France pourrait avoir un rôle pivot en coordonnant l’interaction entre zones métropolitaines, périurbaines et rurales, et en participant activement à l’élaboration des stratégies d’avenir, l’institution semble subir les changements d’un paysage institutionnel d’un gouvernement qui devrait pourtant lui être proche. Est-ce un bilan négatif de l’action régionale qui invite à une telle défiance ? Nous en sommes persuadés.

C’est dans ce climat que l’Assemblée national a voté définitivement jeudi 12 décembre 2013 la création d’une nouvelle entité qui élargit les frontière de notre capitale à un cadre plus vaste.

3. L’incapacité de l’institution à se réformer et à relever les défis d’aujourd’hui.

La construction d’un Hôtel de Région plutôt que d’un service public moderne

La promotion de la transparence et de l’intégrité dans la vie publique est l’un des axes centraux de l’agenda du Président de la république M. Hollande. Comme dans les autres pays de l’OCDE cette action est essentielle pour soutenir les politiques de sortie de crises en restaurant la confiance des citoyens et des entreprises dans la sphère publique.
Une Commission de réflexion pour la prévention des conflits d’intérêts dans la vie publique (Commission Sauvé) a été instituée en 2011 afin de mener une enquête sur les cadres réglementaire et institutionnel relatifs à la prévention des conflits d’intérêts. A suivi la Commission de rénovation et de déontologie de la vie publique créée en 2012 par le président de la République. Malgré l’initiative de certains acteurs de l’opposition régionale [3], cette commission ne s’est pas penchée sur la situation de la Région Île-de-France, laissant la presse se faire l’écho des dysfonctionnements et de l’opacité de la gouvernance régionale [4].

L’idée serait elle de laisser l’exécutif régional régler ses propres problèmes sans s’en mêler ? C’est dans cette perspective que le rapport Karoutchi s’est penché sur les 35 organismes associés de la Région Île-de-France, pour, de façon très politiquement correcte, répondre tout à la fois qu’ils sont nécessaires mais réformables. Suivant la prévenance de cette analyse, est proposé une réforme des organismes associés les regroupants en un nombre moins voyant.
Pourtant la question centrale n’est pas le nombre des organismes associés. La question est de savoir pourquoi des compétences régionales sont gréées gérées par des organismes autonomes ? Pourquoi le Président de la Région Île-de-France préfère-t-il s’affranchir du statut de la fonction publique pour confier le service public à des organismes associés ? Est-ce parce que ce ne sont pas des fonctionnaires protégés par le statut et qui peuvent dire « non » mais des "copains et leur famille" pour reprendre les termes du Canard enchainé [5] ?

La modernisation du service public ne se fait pas par des mesures de communication mais par une véritable réflexion sur les procédures et notre façon de travailler. C’est cela qu’attendent les salariés de la Région Île-de-France.

La Région Île-de-France va s’offrir un Hôtel de région, en fin de mandature... et après 3 mandature a-t-on envie d’ajouter. Est-ce vraiment l’urgence ? Est-ce vraiment ce qui va rendre plus efficient l’action régionale ? Bien sûr que non. Nous sommes encore dans un gadget de communication bien éloigné des enjeux d’aujourd’hui. Or l’urgence, c’est faire face à la crise et offrir des emplois.

Pour aller plus loin :
 17/12/2013, Le Figaro, Les Franciliens dépossédés de leur destin, Valérie Pécresse. Cet article donne sept raisons en défaveur du projet gouvernemental par la présidente du groupe UMPS au Conseil Régional d’Île-de-France. L’article est repris sur le site deputes-ump.fr.
 17/12/2013, Le Figaro, L’urgence d’un projet, Nathalie Kosciusko-Morizet et Christian Saint-Étienne. Cet article de la candidate à la mairie de Paris et du Professeur titulaire de la chaire d’économie au Conservatoire national des arts et métiers, souligne que le projet entraînera une hausse massive des impôts. L’article est repris sur le site cseparis2014.fr.
 12/12/2013, Le Canard enchaîné, Le millefeuille administratif cuisiné en pudding indigeste et Cagnottes en péril. Le premier article est sous-titré : « le "choc de simplification" promis par Hollande accouche d’un colossal pavé législatif qui réussit à fédéré contre lui communistes et sarkozystes. ». Le second article souligne les enjeux de pouvoir autour de la création de la métropole du Grand Paris et critique l’usine à gaz pour y répondre par la création de conseils de territoire préservant et multipliant les avantage des élus.